PYEONGCHANG 2030, L'après Olympisme vers la paix et la prospérité

Les origines du projet :

 

L’enlèvement de pieux sous-marins, non loin de la frontière maritime de Ganghwado, et les événements diplomatiques aux Jeux olympiques symbolisent à nos yeux un acte d’ouverture vers la paix. Notre volonté est de nous accrocher à ces initiatives naissantes dans le but de mener des réflexions et des actions de co-construction de la paix. Notre équipe est pluridisciplinaire, cependant nos axes privilégiés sont les « spatialités ». Percevoir et comprendre des espaces et lieux permettent de révéler des pratiques, des usages et des modes de vie. Nous pensons que le vivre-ensemble et la cohésion sociale se manifestent au travers de spatialités que nous construisons. Des espaces projetés qui insufflent des développements territoriaux porteurs d’économies douces et respectueuses d’un environnement (tant humain que paysager). C’est à partir de cette problématique du vivre-ensemble que nous proposons de co-construire la paix. Avec notre équipe, nous proposons donc un dossier au Forum de la paix. Notre projet s’intitule : « PyeongChang 2030, un modèle de développement post-olympique vers la paix ».

 

Au lendemain des jeux olympiques d’hiver de 2018 en Corée, la région de PyeongChang a été portée par de nouvelles formes de cohabitation. Des dynamiques remarquables ont été observées entre populations autochtones et visiteurs et tout particulièrement des partenariats entre les deux pays voisins : la Corée du Nord et la Corée du Sud. En effet certaines villes de la région de Gangwon ont participé et se sont investies pour édifier l’événement. Ces mutations territoriales nous en donnent une lecture tant à l’échelle des petites localités et métropoles qu’à l’échelle internationale. Par ce processus, d’ici 2030, PyeongChang sera une référence sur la manière d’opérer des établissements pacifiques à la suite d’événements remarquables. C’est par cette thématique de coexistence pacifique, de « paix » que nous envisageons d’orienter un séminaire.

 

Données du projet

Territoire : Gangwon SUD 강원도
Superficie : 16 894 km²

Population : 1 561 313 hab

Lieu : Gangneug, 강릉시 Corée

Opération : Construire une stratégie de dévelloppement après les jeux olympique de PyeongChang pour préparer le territoire à l'ouverture de la DMZ .

Equipe : Nuit뉘 architecture, RE:TMUS Architecture
Coût de la première action : 24 000 €ht


Intervenants sur le projet : Joomin Kim Architecte enseignante à l'Université catholique de Kwandong à Gangneung, Thomas BONNENFANT Architecte IE au laboratoire CNRS AAU et PACTE Grenoble, Jeong Seung Bok, co-responsable de l’Agence RE:TMUS Architecture et enseignante à l’Université de Sejong, Magali DESCHAMPS, consultante en Tourisme. Halimatou MAMA AWAL, Architecte DE - Docteur en architecture de l’université de Grenoble chercheuse associé laboratoire MHAevt - Eric Monin, historien et sociologue du sport français, spécialiste du Mouvement olympique international - Institut Français de Corée du Sud

Conférencier : Mr Mickael Jakob, théoricien du paysage porfesseur à Harvard Université - Mr David-Pierre Jalicon, Architecte Seoul, Lauréat de la Villa Médicis - Mr Linus von Castelmur, Ambassadeur de Suisse en Corée pays du siège Olympique,
Avancement : MOU de 5 ans Corée / France

Université :

Université catholique de Kwandong à Gangneung & l’École Nationale Supérieure d’Architecture de Grenoble présidé par Marie Wozniak

 

 

 

Notice

 

SÉMINAIRE INTERNATIONAL EN ARCHITECTURE
action starter

 

Par le séminaire nous souhaitons mettre sous une forme pédagogique la démarche du projet collectif/commun. Qu’est-ce que le séminaire ? Le séminaire constitue un point de départ dans le but de mener une réflexion sur le changement et les futures transformations. Nous envisageons dès le mois de février, une période qui représente les « un an des jeux olympiques » de programmer un moment d’échange autour de la thématique de PyeongChang. La thématique et la question posée sont la requalification et/ou reconversion des équipements sportifs actuellement inoccupés tout en prenant en considération la biodiversité du territoire et l’héritage des jeux olympiques. L’enjeu est d’imaginer, d’inventer, de projeter des transformations tout en intégrant dans le processus de projet les acteurs concernés qu’il soient habitants, usagers, travailleurs, politiciens ou visiteurs, mais également les envies et désirs de ces derniers qui sont moteurs de cohésion et de biodiversité sociale.

 

Le séminaire ouvrira donc des perspectives sur des méthodologies et des pédagogies sensibilisant à des processus de projets participatifs, ce qui donnera des outils concrets aux politiques d’aménagement territorial. Pour la région de Gangwon, l’objectif est de travailler dans un bassin d’échange collatéral, c’est pour cela que nous envisageons de créer cette plateforme d’échange entre des étudiants Coréen et Français. Le partenariat se fera entre l’université catholique de Kwandong et l’École Nationale d’architecture de Grenoble. Une sélection d’étudiants Franco-Coréenne a été orientée vers les Universités et Écoles où des savoir-faire spécifiques au sujet sont maîtrisés tels que l’architecture des territoires de montagne, des politiques de villes solidaires, l’expérience du phénomène touristique, l’héritage olympique également rapproche la Ville de Grenoble et la Ville de PyeongChang. Le séminaire est composé de plusieurs temps : Workshop (studio), conférence, exposition Intitulé du séminaire : « PyeongChang territoire post-olympique, de nouveaux usages vers de nouvelles formes d’habiter »

 

La Corée, culture contemporaine et traditionnelle


La Corée du Sud partage sa culture traditionnelle avec celle de la Corée du Nord. Elle est influencée par l’époque impériale de la Chine, encore présente aujourd’hui notamment dans le langage appelé Chino-coréen. Les traditions sont encore très respectées dans le mode de vie de tous les jours, elles coexistent avec la forte croissance et l’innovation. La culture contemporaine est ainsi articulée entre l’innovation et la culture traditionnelle. Depuis les Jeux olympiques de 1988 la Corée prend goût à pratiquer des sports et donner le meilleur d’elle-même fait partie des valeurs traditionnelles coréennes.

 

Valeurs olympiques internationales, vecteur de paix

 

PyeongChang a accueilli les 23e Jeux olympiques d’hiver du 9 au 25 février 2018. Ces jeux d’hiver sont à leur origine (en 1901) une compétition multisports internationale qui a lieu en Suède sous le nom de Jeux nordiques. Ils deviennent pour la première fois des « Jeux olympiques d’hiver » à Chamonix en 1924. Les Athlètes portent alors des valeurs olympiques après avoir prêté serment en se présentant comme :  “Concurrents loyaux, respectueux des règlements, dans un esprit chaleureux et chevaleresque pour la gloire du sport et de l’honneur de nos équipes”. En 1968, Grenoble accueille à son tour les Jeux-olympiques d’hiver qui sont organisés sur les massifs de Belledonne et du Vercors. Pierre de Coubertin*(1) écrit que “Le sport et la culture de la montagne sont intimement liés”. La même année au Mexique, dans la continuité olympique, John Carlos et Tommie Smith élèvent un gant noir vers le ciel pour revendiquer le racisme auquel ils sont confrontés au quotidien. Depuis cette date, les projets olympiques sont aussi portés par les valeurs des droits de l’Homme. Les jeux sont aussi des moments forts de création : architecturale,   des infrastructures de transport, mais aussi artistique comme la cérémonie d’ouverture. Philippe Decouflé crée en 1992 la mise en scène très remarquée des festivités d’ouverture des Jeux olympiques d’Albertville avec le costumier Philippe Guillotel. À partir de cette date, les cérémonies deviennent des projets d’art du spectacle. Le site olympique de PyeongChang 2018*(2) est, comme Grenoble, réparti sur trois lieux distincts : la station de ski Alpensia, dont le nom se compose des termes de « Alpes », « fantastique » et « Asie ». Le second site à Gangneug, (ville de 230000 d’habitants sur le littoral oriental du pays) est une région trop peu développée en Corée. Et PyeongChang qui signifie littéralement « Paix et prospérité ». À travers ces sites, nous pouvons apercevoir les symboles de Paix et les valeurs olympiques présents dans les traditions de la région, comme les valeurs de « partage et vivre-ensemble » qui occupent une place importante.


1. Pierre de Coubertin : Historien et pédagogue français qui a fortement milité pour la présence du sport dans les écoles et a relancé les Jeux-olympiques d’aujourd’hui.
2. éric Monnin “De Chamonix à PyeongChang Un siècle d’olympisme en hiver” Ed Désiris, Nov. 2017 gap

 

PyeongChang est un site aujourd’hui Post-olympique imprégné d’histoire


Les mémoires de ces jeux et de ces infrastructures demandent une attention particulière pour être habités. Les autorités prises par la précipitation de l’événement opèrent techniquement pour garantir le bon déroulement du Méga-Sporting Event. En lien avec les autorités gouvernementales Coréennes, nous nous donnons comme mission de revitaliser le territoire après l’organisation mondiale de ses jeux. Sa position centrale par rapport à la grande Corée en fait un territoire d’articulation future entre les deux états économiques et un symbole de paix. Entre la République populaire démocratique de Corée et la République de Corée au Sud, ce premier pas fait vers l’ouverture, et l’importance des jeux olympiques a fait bouger les gouvernements, nous montre l’intérêt de travailler sur ce territoires. La guerre entre les deux Corée n’est pas une évidence tant par la définition du droit international humanitaire que par le statut plus affirmé des tensions entre les deux gouvernances. Depuis que la Corée-du-Sud a refusé de signer le traité d’armistice de PanMunJeom le 27 juillet 1953, des incidents se produisent le long de la zone démilitarisée (DMZ). Ces actions militaires exécutées depuis 65 ans sont surnommées la guerre du Crabe. La délimitation est d’une épaisseur de 4 km et d’une longueur de 238 km. Lorsque l’on jalonne le territoire et que l’on se rapproche des limites nord de la Corée du Sud, on mesure le rapport conflictuel militaire entre les deux nations. À Gyodongdo (l’île habitée la plus proche de la frontière), on peut voir les infrastructures militaires et les services construits afin de se protéger d’éventuelles invasions. Une enceinte en grille métallique électrifiée encercle l’île. D’une hauteur de 3 mètres, l’enceinte est ponctuée par des miradors et des caméras multidirectionnelles. Notre entrée sur l’île se fait par le pont entre l’île Gyodongdo et l’île de Ganghwado. Un barrage militaire nous accueille et après avoir rempli une fiche de renseignement, une pancarte est apposé sur le pare-brise de la voiture. Elle informe et officialise notre statut sur le territoire militarisé et ainsi nous pouvons circuler librement sur l’île à la rencontre des pêcheurs et artisans locaux. Lors de notre parcours, nous avons observé l’enlèvement de pieux maritimes. Cet acte mis en oeuvre par le gouvernement ou bien par les pêcheurs nous motive à soutenir des processus en cours symboliques d’initiatives et d’attitudes se dirigeant vers la paix et le vivre-ensemble.

 

Pour la paix ou les paix 

 

Le changement de déterminant influence notre compréhension du mot et influence le rapport que l’on veut entretenir avec le sujet. Ainsi la rediffusion sur France Culture de la conférence des Mardis des Bernardins sous le titre de “Cultiver la Paix” nous fait réfléchir sur la notion de paix. Les invités d’horizons bien divers sont ici rassemblés autour d’une même table et discutent sur leur rapports à la paix et à la définition propre à chacun. Pour le projet cela vise à positionner concrètement le développement de Pyeongchang sur cette notion. Les hommes n’ont jamais eu de difficultés à trouver des raisons de se faire la guerre. Les rencontres et débats Les Mardis des Bernardins*(1) proposent de renverser le problème : « Pourquoi et comment construire la paix ? Au lieu de penser la paix comme une non-guerre, nous voulons réfléchir aux modalités positives du vivre-ensemble. Loin des grands principes, nos invités se demanderont comment les citoyens peuvent concrètement cultiver la paix.» *(2) Les interventions de divers participants de cette conférence nous éclairent sur ces modalités de construction de la « paix » à partir de la redéfinition du vivre-ensemble : «Le présentateur : Docteur Jean-Jacques Rein à Hadassah à Jérusalem représentant d’Un coeur pour la paix : Pour vous un patient est un patient et le conflit qui oppose les israéliens aux palestiniens est une question qui ne se pose pas ?
- Jean-Jacques Rein : L’homme n’a pas foncièrement en lui une idée de paix. Je pense que l’homme est concurrentiel. L’homme au départ est animé de pulsions qui ne sont pas forcément positives et donc une partie de l’éducation consiste à transformer ces pulsions très énergétiques en quelque chose de positif. La paix n’est pas quelques choses qui va de soi. Ce n’est pas un état original vers lequel on va revenir. C’est la paix que l’on veut créer.
- Reza : Parfois nous parlons comme si tout était fait, comme si tout était atteint, comme si tout était construit, comme si tout était déjà atteint à tous les états. On oublie qu’historiquement nous ne sommes qu’au début de l’humanité. On oublie que l’époque dans laquelle nous sommes, le 21e siècle, n’est juste que le début de ce que peut être l’histoire de l’humanité. On oublie que nous vivons dans un univers où il y a des centaines et des centaines de milliards de planètes dont nous ne savons pas ce qu’il se passe dedans. On parle comme si tout était acquis et c’est comme ça qu’est l’homme et c’est comme ça qui va être.
- Samuel Grzybowski : Dans une pensée universelle, tout le monde veut la paix, mais dans les faits. Ce n’est pas vrai. Il y a des gens qui veulent la guerre et il faut être autant organisé que ceux qui la veulent. La coexistence est la seule voie active pour apprendre à vivre tous ensemble.

- Reza : "Seules les libertés de presse, d’expression et d’opinion peuvent faire avancer les peuples sur le chemin de la paix." Ainsi pour notre équipe la paix n’est pas seulement en situation de guerre. On peut la retrouver à la suite d’un passage pédestre proche d’une autoroute, ou bien après une réunion, etc. Si dans la conférence les temps de paroles des invités permettent de donner des clés de lectures sémiotiques sur la notion de paix, il convient de prendre en considération également les actions menées sur la paix et son architecture. Pour cela la référence aux actions de paix qu’APSA*(3) met en place est un outil théorique pour comprendre un territoire avec un contexte de tension entre les peuples africains de même culture traditionnelle.


1. www.collegedesbernardins.fr/rencontres-et-debats/mardis-des-bernardins
2. Conférence des mardis des Bernardins le 4 novembre 2014,, Samuel Grzybowski, fondateur de Coexister et d’InterFaith Tour. Jean-Jacques Rein, chef de service de cardiologie pédiatrique de l’hôpital Hadassah à Jérusalem. Reza, photojournaliste humaniste, fondateur de l’ONG Ainaworld et de l’association Les Ateliers REZA.
3. APSA est un organisme qui oeuvre dans la prévention des conflits et la consolidation de la paix sur le continent africain

 

La promotion des pratiques démocratiques,


Dans une perspective de valorisation de la construction de pratiques et d’espaces de paix, il est essentiel de penser une bonne gouvernance qui respecte les droits de l’Homme. Prenons l’exemple du rapport de “L’Architecture africaine de paix et de sécurité (APSA)”, qui écrit : “Il s’agit, ce faisant, de mieux connaître l’Afrique, afin de construire un partenariat efficace entre acteurs de la gouvernance mondiale mutuellement responsables et respectueux les uns des autres, dans l’intérêt de l’humanité.”*(1) Si l’Afrique dans cette démarche de retrouver la paix par la connaissance et la reconnaissance de soi et parallèlement de l’autre, ici la démarche apporte un ingrédient de plus, qui est celui d’une vision prospective commune. Cette construction du commun implique de considérer et d’intégrer les multiplicités culturelles. Pour ce faire, il est donc nécessaire de proposer des hypothèses de projet à des échelles d’investissement et/ou d’ambition variées afin d’engager des stratégies de valorisation des richesses du territoire. Ainsi, retrouver la « biodiversité » de la Corée dans son rapport à l’espace, aux ressources et à l’intelligence de l’habiter.

 

Olympique Édifier la paix, les Grands territoires, la Ville,


Le savoir-faire d’édifier implique fondamentalement d’une part la connaissance du territoire, son passé et son histoire afin de mieux comprendre les réalités d’aujourd’hui, et d’autre part l’édification impulse des projections futures imaginées. Les lieux qui composent le territoire sont constitués d’espaces bâtis, d’espaces moins bâti et d’espaces libres. L’habitabilité même d’une région se rend perceptible par des marqueurs de temps qui font de ces espaces des lieux à caractère uniques. Les événements dans leur histoire ou dans leur actualité nous situent dans le temps. Nous sommes ici présents sur cette montagne-là par exemple. L’approche architecturale que nous mettons en place dans ce projet concret s’enrichit donc de cette manière de penser. Nous envisageons d’inventer des méthodologies de co-construction, ensemble construisons le territoire post-olympique de PyeongChang vecteur de paix et de cohésion sociale. La démarche projectuelle prendra en considération une vision élargie de l’événement post-olympique intégrant tant le changement dans une localité que la répercussion de cette transformation à une géographie plus globale.

 

1. lettre de communication de l’architecture de paix de sécurité en Afrique : La force africain en attente Communication de M. Jean-Baptiste NATAMA Directeur de Cabinet de la Présidente de la Commission de l’Union africaine (14ème forum de l’IHEDN sur le Continent Africain) Paris 10 juin 2013.

 

“Tout le monde veut construire", nous rapportait Jimyong Chang*(1) chargé d’investissement Business France de l’Ambassade de France en Corée. Cette remarque nous semble intéressante, car si nous partons du constat que tout le monde veut construire, pourquoi ne pas créer l’espace conceptuel pour le faire ? La méthodologie du projet que nous proposons se positionne dans une dimension collective ou chacun retrouve ses propres intérêts. Construire, fabriquer, édifier, etc., que ce soit un programme informatique, une politique de gouvernance, une pédagogie, ou alors un édifice, serait de nature humaine. À partir de cette aspiration pour tous de construire, la pensée architecturale du projet révélerait une diversité d’échelles humaines à lire d’une manière simultanée : des grandes échelles territoriales et cartographiques (le 100 000e par exemple) jusqu’aux échelles de grandeur réelle (échelle1/1) pour la mise au point de prototypes, d’installations techniques, de constructions, et de traitement des sols, tout en passant par des échelles intermédiaires, des espaces d’entre-deux, de regroupements d’habitations, etc. En déconstruisant la complexité du territoire au travers d’outils conceptuels et théoriques, il est possible de lire une quantité de données, et grâce aux outils numériques il est possible de traiter les données afin de modéliser des modèles contemporains d’habiter. Notre souhait est ainsi de fédérer les pensées par de la co-construction avec l’implication des désirs et la légitimité de chacun. Il est fondamental de protéger le territoire pour retrouver la paix. La capacité architecturale à voir ou à percevoir les qualités spatiales à plusieurs échelles permet de positionner plus justement les choix d’établissement. À l’échelle du territoire, observer et révéler les potentiels paysagers d’un ravin, d’un plateau, d’une combe ou bien d’une lisière de boisement, mais également comprendre l’histoire de ce paysage et le fonctionnement des formes urbaines, est un enjeu majeur dans la démarche de lecture du territoire. Une lecture qui se précise et s’ajuste à chaque échelle de la vie. À partir du quartier, nous pourrons percevoir les rapports et les interactions entre masses bâties, espaces vides, les ombres et les lumières, nous pourrons rendre visible les mobilités rythmant les usages du quotidien, et une multiplicité d’autres choses, etc. Retrouver les qualités spatiales à toutes les échelles est un exercice intellectuel qui constitue la matière première de l’établissement humain. Ces fondamentaux permettent d’inscrire et d’établir des positionnements pour écrire conjointement le futur de nos territoires.

 

1. Entretien du 2 août 2018 à Séoul avec Jimyong Chang, Kim Joomin et Thomas Bonnenfant.

 

La diversité constructive

 

La diversité constructive influence la qualité de vie et la richesse culturelle de celle-ci. La qualité de vie et la richesse culturelle s’illustrent par la diversité des modes d’habiter et des modes constructifs. La forte culture paysanne de la région de PyeongChang a donné corps à des constructions à caractère artisanal le plus souvent produit dans des systèmes informels et d’auto-construction. Dans cette région, notons que l’on constate une utilisation très présente de la terre crue comme matériaux de construction. Ainsi, lorsque l’on sort de la mégalopole de Séoul 1, on peut observer l’abandon de ses maisons sensibles (ou fragiles). La cause n’est pas vraiment définie, mais il est possible d’émettre des hypothèses.
La forte croissance démographique a poussé les agriculteurs à travailler plus vite et plus longtemps et donc de délaisser un héritage de savoir-faire artisanal afin de s’établir dans des habitations plus standards et d’une manière plus inerte. Ce phénomène interroge les connaissances empiriques des méthodes de mise en oeuvre. Explorer les techniques vernaculaires de la construction locale dans le but d’en extraire des connaissances à réactiver et à réinterpréter pour inventer des formes contemporaines d’habiter est une approche qui intègre les ressources locales, de ce fait, des architectures avec des perspectives de soutenabilité. Dans ces travaux, la docteure en architecture d’Halimatou Mama Awal*(2) nous présente des lectures de dispositifs informels et d’auto-construction. Il s’agit d’inverser le regard et de rendre visible ce qui est construit de manière spontanée par les populations. “Les réalités du territoire sont devenues autres. Quels sont les outils qui nous permettent de lire ces nouvelles réalités? Comment opérer ce changement de «lunettes» que nous propose Bernardo Secchi pour lire et écrire la «ville contemporaine» *(3)” L’approche et la lecture architecturale de la recherche spécialisée nous invite à réquisitionner PyeongChang pour en proposer des transformations. Il ne s’agit plus de bâtir la région de Gangwon avec un mono-matériau mais plutôt d’inscrire la démarche dans une culture constructive diversifiée s’appuyant sur des matériaux, des programmes et des techniques de mise en oeuvre au degré d’écologie variable. Quelle réglementation, quelle loi de la construction et de l’aménagement du territoire peuvent-elles être proposées pour vivre-ensemble ? Avec les événements à venir, la région doit laisser place à l’imaginaire, à la porosité des lieux dans la projection, à l’établissement humain autant dans ses pratiques que dans sa forme purement spatiale. La paix du territoire nécessite la projection de spatialités pacifistes, il renvoie à une pédagogie et un apprentissage du territoire, tant dans des lectures des caractéristiques des lieux, de ses densités, de ses dilatations, de ses distanciations, de ses ambiances, climatiques ou sonores, que dans son développement social aux économies innovantes.

 

1. Séoul est composé de 9888055 habitants, elle est classée devant Mexico et New York par rapport au nombre d’habitants.
2. Halimatou Mama Awal, « La métropole-village(s) contemporaine de Ouagadougou Explorer les potentiels d’un territoire, supports de processus de projet architectural » – 12 janvier 2015 à 14h – ENSA de Grenoble
3. Bernardo Secchi 1934/2014 - Enseignant, praticien et théoricien renommé de l’urbanisme. Co-fondateur de Studio en 1990, bureau sélectionné parmi les dix équipes qui ont travaillé sur le Grand Paris entre 2008 et 2009. “Studio” a réalisé de nombreuses études de villes et de territoires (les plans de Bergame, Pesaro, Brescia, Prato ; les études de la région de Pescara, du Salento, du Val de Durance) et des projets à différentes échelles. Prix spécial du jury du Grand prix de l’urbanisme (2004), Bernardo Secchi est docteur honoris causa de l’Université Pierre Mendès France de Grenoble (1996) et de l’Université de Hasselt (2011). Il a reçu la Légion d’honneur en 2010. Il est l’auteur de Première leçon d’urbanisme (Éditions Parenthèses, 2006) et de La ville du vingtième siècle (Éditions Recherches, 2009).

 

Enjeux touristiques

 

La France dans son histoire du tourisme est riche d’expérience et peut sans complexe servir de modèle pour la Corée. Elle a su comprendre la polycentralité de son territoire hétérogène et singulier pour en maîtriser et valoriser les enjeux touristiques. Par exemple, les stations balnéaires du sud de la France sont caractéristiques d’une forte densité touristique et représentatives d’une stratégie de tourisme de masse. Sur la Côte Atlantique, on valorise le développement du tourisme familial. Au Mont-Saint-Michel, on travaille sur la gestion des flux du tourisme de masse afin de protéger les lieux et préserver la tranquillité des résidents. C’est ce que l’on appelle le tourisme durable. Ou encore en montagne, on développe l’intérêt pour un tourisme de sport et soucieux de l’environnement, on parle dans ce cas d’Écotourisme. Les nombreuses références dont dispose la France nous permettent d’avoir un regard critique sur le développement touristique et d’agir vers des valeurs nouvelles de développement durable, respect de l’environnement, vecteur d’interaction entre visiteurs et populations locales. Les gouvernements ont depuis très longtemps pris conscience de l’intérêt du tourisme dans l’économie d’un pays et en ont fait une priorité dans les politiques de développement et d’investissement territoriales. Les projets architecturaux, de développement, de réhabilitation d’une région, d’une ville ou même d’un quartier prennent tout leur sens lorsqu’ils tiennent compte de l’attraction touristique dans les enjeux socio-économiques. En France, la qualité spatiale des offres touristiques est intégrée dans l’aménagement du territoire. La Corée fait face aujourd’hui aux mêmes problématiques de développement touristique que la France. Sa situation géographique, son territoire montagneux, ses îles, son climat et son potentiel balnéaire donnent à la Corée une capacité de diversification touristique intéressante. Le contraste très fort entre la modernité de sa mégalopole et le traditionalisme de sa campagne fait de la Corée un territoire propice au développement touristique spécifique. De par sa richesse en territoires encore vierges, la Corée dispose d’un vaste réservoir naturel enclin au développement de projets liés à la protection environnementale et donc à l’écotourisme. Avec l’exemple des villes vertes françaises, la Corée peut rapidement se tourner vers le développement du tourisme durable et la protection de l’environnement afin de sauvegarder son territoire, sa culture, ses traditions et préserver son héritage pour les générations futures. Le tourisme en soi est une notion très vague et comprend plusieurs aspects. Lorsque l’on arrive pour la première fois dans un endroit, une ville, un pays que ce soit pour un voyage, une représentation, une réunion ou le commencement d’une nouvelle vie, nous avons tous ce premier regard de touriste. Le tourisme peut donc se définir comme une première rencontre avec un lieu, une découverte d’où découleront des émotions. Prendre conscience de cette notion très vaste permet de comprendre que le tourisme est présent partout et à tout moment et ne se résume pas à quelques domaines spécifiques. Ainsi, l’intérêt du tourisme peut se retrouver dans tous les aspects tels que socio-économiques, culturels, artistiques, technologiques, médicaux … Ce concept est déjà très bien intégré par les architectes dont l’enjeu majeur aujourd’hui n’est plus uniquement d’édifier de nouveaux concepts, mais surtout de définir et valoriser le patrimoine existant afin de préserver le patrimoine matériel comme immatériel. L’étude économique d’un projet ne peut être complète sans une approche environnementale, culturelle et sociale. La problématique du développement post-olympique des villes entre dans ce même protocole de réflexion. La France comme la Corée ont connu une valorisation économique, touristique et culturelle soudaine et éphémère d’une région suite à l’organisation d’un Grand Evènement Sportif International (GESI). La question de la requalification des infrastructures en nouveaux pôles d’activités, la revalorisation et l’édification du territoire pour la relance socio-économique de la ville et région est primordiale. Et nous ne sommes pas les premiers à nous poser cette question. Voici quelques articles publiés à ce sujet : The Conversation « As the PyeongChang olympics come to a close, what legacy will it leave ? » 23.02.2018, Citylab “Here’s what PyeongChang looks like now” 05.06.2018. « 21 mesures pour optimiser les retombées touristiques des grands évènements sportifs en France »*(1). Il nous parait donc pertinent d’envisager la mise en place d’une gouvernance comme élément de réponse à la question de l’avenir durable des villes post-olympiques.

 

1. Rapport français de la Mission Sport & Tourisme du 17.07.2018 – www.entreprises.gouv.fr

 

L’objectif premier

 

Notre réflexion vise à orienter des attitudes d’établissement humain responsables des territoires et à toutes les échelles soucieuses des enjeux environnementaux. Aujourd’hui et dans le futur, la question de la culture d’habiter est un enjeu majeur pour vivre de manière plus diversifiée et plus sensible aux valeurs humaines et sociétales. En nous appuyant sur la lecture du territoire sud-coréen, il est intéressant de voir la fluctuation d’édifices aux principes constructifs similaires émergeant pour offrir aux habitants un mode de vie particulier. Ici il n’est pas question de remettre en cause le contexte économique de ses constructions qui ont permis de faire valoir une certaine richesse au pays. D’un point de vue formel, les édifices s’érigent les uns à côté des autres, de plus en plus proches, une densité d’habitations est générée ce qui en soi favorisent des mobilités douces de proximité. Ce qui est inquiétant dans ce type d’opération, ce sont les conséquences sur les ambiances sonores par exemple. On observe des façades lisses composées de béton et de verre favorisant la réverbération d’ondes sonores. Les nuisances sonores sont donc amplifiées et impactent la qualité de vie de la cité.


L’édification du territoire

 

Toutes les échelles de la vie permettant de répondre à des enjeux multiples vise à renforcer des liens entre les villes, les régions et le gouvernement. Instruire des schémas de cohérence territoriale permet de développer des stratégies de valorisation des ressources de bassins de vie à forte biodiversité. Pour cela, il est nécessaire de produire des documents réglementant des aménagements afin d’orienter des stratégies de développement économique et social intelligentes internationalistes tout en accompagnant des actions locales éco-responsables.


Accompagner les projets colossaux aux enjeux communs

 

Les dynamiques diplomatiques révélées cette année par les Jeux Olympique de PyeongChang ont été relayées par de nombreux sommets politiques. Il s’agit donc dans ce projet de prendre en compte l’impact de ces événements sur le pays, mais également les résonances dans la localité Gangwon étouffée par des problématiques propres au terrain et au vivre-ensemble. Les ouvrages en discussion comme la continuité ferroviaire du Transsibérien vers Busan ou bien du gazoduc ouvrent un champ de possibles vers des perspectives de construction du futur consolidant un territoire d’unification. [« Une fois que la ligne de chemin de fer trans-coréenne sera construite, elle pourra être connectée avec la ligne du transsibérien russe et ainsi acheminer des marchandises depuis la Corée du Sud vers l’Europe, ce qui sera positif pour les deux Corées mais aussi pour la Russie » a déclaré Moon Jae-in dans les médias Russes à la veille de cette visite.] *(1) Ces opérations constituent des opportunités qui peuvent prendre de l’épaisseur et ainsi disséminer la limite géopolitique actuelle. Ainsi , imaginer et projeter des brèches pacifiques dans la limite transversale de la DMZ afin d’accompagner des frontières qui s’ouvrent progressivement. Ces actions touchent aussi bien les autorités territoriales, les grands dirigeants d’entreprise, le domaine de la recherche au sein des Universités que les start-up moteurs d’innovations.


1. Dorian Malovic, “Le chemin de fer coréen de la paix passe par Moscou” Lacroix 22/06/2018 à 6h36